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Paris est la capitale de la mode.
Paris fait plus que la loi, il fait la mode.
Victor Hugo, Les Misérables
C’est sous l’impulsion de Louis XIV que Paris
devient la capitale de la mode européenne. Son
ministre Jean-Baptiste Colbert s’exclame à l’époque :
« la mode est pour la France ce que les mines du
Pérou sont pour l'Espagne. » C’est par le faste et l’ex-
travagance de sa Cour que le Roi-Soleil entend affi-
cher sa suprématie ; il fait venir à Versailles les
meilleurs tailleurs et, depuis cette époque, Paris n’a
jamais cessé d’exercer son influence sur la mode. Bien
entendu, l’Angleterre et l’Italie ont également joué
un rôle de prescripteurs des modes. La redingote
anglaise a connu un succès historique et il y a eu
l’engouement pour les indiennes*. Mais Paris possède
cette capacité à digérer tout ce qui passe et à en
ressortir perpétuellement de nouvelles idées créatives.
L’histoire retient la première maison de haute cou-
ture installée à Paris en 1858, certes par un anglais,
Charles Frédéric Worth. Chaque nouvelle maison
renforce la position de Paris qui domine la scène de
la mode et voit arriver des créateurs et des couturiers
étrangers comme l’Irlandais Edward Molyneux
(1919), l’Italienne Elsa Schiaparelli (1935), ou
l’Espagnol Cristobal Balenciaga (1938). Ces talents
étrangers sont attirés par Paris et les influences de
l’Europe profitent ainsi à la ville.
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Paris se forge une image « haute couture », appel-
lation protégée dont ne peuvent se prévaloir que les
grandes maisons de couture sous réserve qu’elles
respectent des critères de fabrication et de communi-
cation draconiens portant sur une fabrication « arti-
sanale française » et des défilés organisés à Paris
même. C’est la Chambre syndicale de la Haute
Couture, créée à Paris en 1868, qui dicte la loi ; elle
fait, depuis 1973, partie de la Fédération Française
de la Couture, du Prêt-à-porter, des Couturiers et des
Créateurs de Mode.
Paris s’impose durablement avec l’arrivée de créa-
teurs innovants comme Christian Dior (1947) ou
Yves Saint Laurent (1958) qui lui succède d’ailleurs
très provisoirement – en tant que styliste – après son
décès en 1957. Ce florilège incomplet est réellement
impressionnant (voir tableau des griffes p.37). Tous
ces grands couturiers parisiens ont donné naissance à
des marques toujours vivaces, de renommée interna-
tionale.
prestigieux label : Dior, Chanel, Gaultier, Lacroix,
Jean-Louis Scherrer, Dominique Sirop (le dernier
créateur a avoir obtenu son entrée), Torrente et
Hanae Mori. Le nombre de défections s’explique par
le coût que représente le respect des sacro-saintes
règles de la « haute couture ». Alors, faute de trouver
des investisseurs ou souhaitant conserver leur indé-
pendance, les maisons renoncent. Cette situation
affaiblit Paris à une époque où plusieurs grandes
capitales créatives de la planète viennent la concur-
rencer.
Ainsi en Italie, Milan revendique ce statut envié,
avec en prime celui du design. C’est d’ailleurs sa
position de leader en matière de design industriel
dans les années 60 qui lui a permis de développer son
pôle mode et création. Milan a vu naître plusieurs
empires du textile, comme celui de Benetton ou de
Diesel, et de très grandes marques telles Giorgio
Armani, Gianfranco Ferre, Versace, Max Mara,
Missoni, ou Miu Miu. Deux grandes maisons initia-
lement florentines sont cependant passées dans le
giron des empires du luxe français : Emilio Pucci
(créée en 1947, reprise par le groupe LVMH) et
Gucci (créée en 1921, reprise par le groupe PPR).
Aujourd’hui encore, pour nous Français, l’affaire
est entendue : la mode, c’est Paris. Si, traditionnelle-
ment, les régions ont un savoir-faire textile (la région
lyonnaise, le Nord ou l’Alsace), la mode s’élabore à
Paris ; plus rares sont les grandes marques de prêt-à-
porter implantées en régions, comme Cacharel
(1962) à Nîmes. Aussi, lorsque l’on parle de Paris
« capitale de la mode » on n’imagine certes pas que
d’autres villes de la planète puissent briguer cet hon-
neur. Car la vitrine de la mode c’est celle des grandes
maisons de couture, réputées mondialement, et jus-
tement basées à Paris. Il y a peu de temps encore,
Paris comptait dix-huit maisons de haute couture.
En juillet 2004, seulement huit griffes, accompagnées
de jeunes talents « invités », pouvaient revendiquer le
De son côté, Londres est avant tout le temple du
chic*, de la mode pour gentleman , avec des marques
représentatives de la tradition anglaise comme
Burberry (1856), ou emblématiques du chic anglais
comme Paul Smith (1970). Mais, Londres a égale-
ment été à l’origine des tendances vestimentaires
d’avant-garde avec, par exemple, Vivienne Westwood,
la grand-mère du punk*. Un shopping* à Londres,
c’est ainsi la certitude de pouvoir dénicher toutes
sortes de look* , des vêtements résolument vintage*
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aux modèles les plus avant-gardistes. Plus encore qu’à
Paris, la rue, les boutiques, les marchés sont autant
de lieux pour sentir les modes.
sente cependant son premier défilé à Paris (1970) où il
est alors adopté.
Paris, capitale de la mode ? Oui, mais plus exclu-
sivement. La donne est aujourd’hui chamboulée par
la mondialisation des affaires et les stratégies finan-
cières. Paco Rabane, repris par le groupe espagnol
Puig, semble échapper à Paris, sa ville d’adoption.
Que dire d’Emanuel Ungaro détenu par le groupe
italien Ferragamo ? Et de Louis Féraud, dont les
principaux actionnaires sont l’Allemand Escada et le
Néerlandais Secon ? Ou des changements de main de
Balmain et de Jean-Louis Scherrer ? La même question
se pose pour la maison Yves Saint Laurent, achetée
par Sanofi Beauté, puis revendue au groupe PPR.
Dans cette tourmente, la maison Hermès qui a pris
une participation importante chez Jean Paul
Gaultier, reste indépendante. Tout comme la maison
Chanel, depuis 1924 sous la houlette de la famille
Wertheimer. Mais, pour combien de temps encore ?
La haute couture sous l’emprise de la finance ne permet
plus d’associer une marque à une capitale. Hier,
notre capitale attirait les créateurs, aujourd’hui les
capitaux internationaux absorbent des marques deve-
nues apatrides.
Même Anvers compte, depuis plusieurs années,
parmi les grandes villes de la mode. Port marchand,
Anvers a une longue tradition textile, relayée par son
Académie de la Mode qui a vu naître nombre de
créateurs et le fameux « groupe des six » animé par
Dries Van Noten dont font partie Martin Margiela,
Ann Demeulemeester, Dirk Bikkembergs, Raf
Simons et Walter Van Beirendonck réputé pour sa
mode militante. C'est en présentant tous les six leurs
créations, à l'occasion du Bristish Designer Show de
Londres (1988) qu'ils ont capté l'attention des médias.
Depuis, les écoles belge et flamande ont fait de nom-
breuses émules, et l'on découvrira avec intérêt les
créations de Christophe Broich, Véronique
Branquinho, Dirk Van Saene, Bruno Pietres ou
encore Bernard Wilhem.
Et que dire de New York, que l’on pourrait considé-
rer comme la capitale de la mode du nouveau monde ?
New York cultive le futurisme et son goût pour l’argent
et la réussite. Ses marques, mais également celles de la
côte ouest (Los Angeles), profitent d’un grand marché
intérieur. La création de mode new-yorkaise est vivace
– Helmut Lang, Marc Jacobs, Oscar de la Renta – et les
marques savent se créer une notoriété mondiale, à
l’image de Calvin Klein, DKNY, Ralph Lauren,
Tommy Hilfiger, etc.
Autre pôle de résistance à la mode made in Europe :
Tokyo. La mégapole asiatique démontre une passion
frénétique pour la mode et a vu naître des créateurs
de renom comme Issey Miyake (1970), Yohji
Yamamoto (1977), ou encore Kenzo Takada qui pré-
Le luxe suscite les convoitises des grands groupes
industriels, la distribution planétaire et populaire
impose sa loi d’une mode à petits prix. Paris, qui
peut revendiquer son dynamisme dans le prêt-à-
porter, cède pourtant du terrain face à Zara et Mango
qui viennent d’Espagne, ou au Suédois H&M.
Face à de telles transformations du paysage de la
mode mondiale, on peut imaginer un classement
objectif fondé sur des critères pertinents : le nombre
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de créateurs et de grands couturiers installés, le
nombre de marques de prêt-à-porter, le nombre de
maisons et de boutiques, le poids des grands distri-
buteurs, le dynamisme des salons, la fréquence des
défilés, l’influence des bureaux de style, etc.
Paris se proclame une fois de plus « capitale de la
création », en regroupant depuis 2003, 17 salons de
la mode et du design. Mais Milan contre-attaque
avec son projet pharaonique baptisé città della moda ,
qui ambitionne d’être la plaque tournante de la
mode, du design et des arts contemporains. Le titre
s’acquiert aussi à force de communication !
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