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LES CINQ FILLES DE Mrs BENNET



Jane Austen

LES CINQ FILLES DE Mrs BENNET

Pride and prejudice

(1813)

 

Traduit de l’anglais par V. Leconte et Ch. Pressoir

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Table des matières

 

INTRODUCTION              5

I              7

II              11

III              15

IV              21

V              25

VI              29

VII              37

VIII              45

IX              53

X              59

XI              68

XII              74

XIII              77

XIV              83

XV              87

XVI              92

XVII              103

XVIII              107

XIX              123

XX              129

XXI              135

XXII              141

XXIII              147

XXIV              152

XXV              157

XXVI              162

XXVII              169

XXVIII              173

XXIX              178

XXX              186

XXXI              190

XXXII              196

XXXIII              201

XXXIV              208

XXXV              215

XXXVI              224

XXXVII              230

XXXVIII              235

XXXIX              239

XL              245

XLI              250

XLII              257

XLIII              262

XLIV              279

XLV              285

XLVI              290

XLVII              300

XLVIII              312

XLIX              319

L              328

LI              335

LII              342

LIII              352

LIV              360

LV              365

LVI              372

LVII              382

LVIII              388

LIX              396

LX              405

LXI              411

À propos de cette édition électronique              415

 

INTRODUCTION
 

Les intrigues sont simples, quoique nourries d’incidents multiples et variés. Contemporaine des débuts du romantisme, Jane Austen y est restée à peu près étrangère. Elle ne se complaît pas dans la peinture des situations tragiques ni des passions violentes. Observatrice avant tout, elle cherche seulement dans l’intrigue l’occasion de provoquer le jeu des sentiments, de mettre en lumière l’évolution des principaux caractères, et de marquer les traits saillants des autres. C’est par là que ses personnages de premier plan attirent, intéressent et captivent le lecteur. Elle pousse le dédain du pittoresque jusqu’à ne pas nous faire connaître leur aspect physique, mais elle arrive si bien à nous les représenter « du dedans » qu’ils vivent vraiment sous nos yeux. Ses héroïnes ne se montrent ni très sentimentales, ni très passionnées, mais elles ont bien du charme. Leurs natures sont très différentes : Anne Elliot, plus tendre et un peu secrète, Elinor Dashwood, raisonnable et mesurée, Emma Woodhouse, pleine de confiance en elle-même, désireuse de mener à son idée, et pour le plus grand bien de tous, le petit monde qui l’entoure ; Elizabeth Bennet, spontanée, spirituelle et gaie, portant partout sa franchise et son indépendance de jugement. Chacune a ses qualités, ses défauts, ses erreurs d’appréciation, ses préventions. Ce qu’elles ont de commun entre elles, c’est une intelligence fine, pénétrante, et une certaine maturité d’esprit qui donne de la valeur à toutes leurs réflexions.

 

Miss Austen n’a pas moins soigné ses personnages secondaires, et nombreux parmi eux sont ceux qui ont excité sa verve et son sens aigu du ridicule : bourgeoises vulgaires, mères enragées de marier leurs filles, dames de petite noblesse gonflées de leur importance et flattées lourdement par leurs protégés, « baronets » férus de leur titre, que la vue de leur arbre généalogique remplit chaque jour d’une satisfaction inlassable, jeunes filles hautaines et prétentieuses, petites écervelées dont l’imagination ne rêve que bals, flirts et enlèvements, se meuvent autour des personnages principaux et forment un ensemble de types comiques dont aucun ne nous laisse indifférents. De même qu’un lecteur de David Copperfield n’oubliera pas Mr. Micawber et Uriah Heep, celui qui a lu Pride and Préjudice conserve toujours le souvenir de lady Catherine et de Mr. Collins. Au milieu de tout ce monde qui s’agite, quelques observateurs, judicieux comme Mr. Knightley, ou ironiques comme M. Bennet, portent des jugements savoureux, incisifs, dont leur entourage ne fait pas toujours son profit.

 

Ces récits qui se développent à loisir dans une langue claire, souple et aisée, coupés de dialogues animés, ont provoqué les éloges de plusieurs grands écrivains anglais. Walter Scott enviait la délicatesse de touche avec laquelle Jane Austen donnait de l’intérêt aux incidents les plus ordinaires. Macaulay l’a comparée à Shakespeare pour sa facilité à créer des caractères. Thackeray reconnaissait que tous ces petits détails vécus, tous ces menus faits d’observation rendent un son si naturel qu’ils rappellent l’art de Swift. Lewes déclarait qu’il aimerait mieux être l’auteur de Pride and Prejudice que d’avoir écrit tous les romans de Walter Scott. Et les critiques de notre époque continuent à témoigner à Jane Austen l’admiration qu’elle mérite et dont elle a si peu joui de son vivant.

 

I
 

C’est une vérité universellement reconnue qu’un célibataire pourvu d’une belle fortune doit avoir envie de se marier, et, si peu que l’on sache de son sentiment à cet égard, lorsqu’il arrive dans une nouvelle résidence, cette idée est si bien fixée dans l’esprit de ses voisins qu’ils le considèrent sur-le-champ comme la propriété légitime de l’une ou l’autre de leurs filles.

 

 Savez-vous, mon cher ami, dit un jour Mrs. Bennet à son mari, que Netherfield Park est enfin loué ?

 

Mr. Bennet répondit qu’il l’ignorait.

 

 Eh bien, c’est chose faite. Je le tiens de Mrs. Long qui sort d’ici.

 

Mr. Bennet garda le silence.

 

 Vous n’avez donc pas envie de savoir qui s’y installe ! s’écria sa femme impatientée.

 

 Vous brûlez de me le dire et je ne vois aucun inconvénient à l’apprendre.

 

Mrs. Bennet n’en demandait pas davantage.

 

 Eh bien, mon ami, à ce que dit Mrs. Long, le nouveau locataire de Netherfield serait un jeune homme très riche du nord de l’Angleterre. Il est venu lundi dernier en chaise de poste pour visiter la propriété et l’a trouvée tellement à son goût qu’il s’est immédiatement entendu avec Mr. Morris. Il doit s’y installer avant la Saint-Michel et plusieurs domestiques arrivent dès la fin de la semaine prochaine afin de mettre la maison en état.

 

 Comment s’appelle-t-il ?

 

 Bingley.

 

 Marié ou célibataire ?

 

 Oh ! mon ami, célibataire ! célibataire et très riche ! Quatre ou cinq mille livres de rente ! Quelle chance pour nos filles !

 

 Nos filles ? En quoi cela les touche-t-il ?

 

 Que vous êtes donc agaçant, mon ami ! Je pense, vous le devinez bien, qu’il pourrait être un parti pour l’une d’elles.

 

 Est-ce dans cette intention qu’il vient s’installer ici ?

 

 Dans cette intention ! Quelle plaisanterie ! Comment pouvez-vous parler ainsi ?… Tout de même, il n’y aurait rien d’invraisemblable à ce qu’il s’éprenne de l’une d’elles. C’est pourquoi vous ferez bien d’aller lui rendre visite dès son arrivée.

 

 Je n’en vois pas l’utilité. Vous pouvez y aller vous-même avec vos filles, ou vous pouvez les envoyer seules, ce qui serait peut-être encore préférable, car vous êtes si bien conservée que Mr. Bingley pourrait se tromper et égarer sur vous sa préférence.

 

 Vous me flattez, mon cher. J’ai certainement eu ma part de beauté jadis, mais aujourd’hui j’ai abdiqué toute prétention. Lorsqu’une femme a cinq filles en âge de se marier elle doit cesser de songer à ses propres charmes.

 

 D’autant que, dans ce cas, il est rare qu’il lui en reste beaucoup.

 

 Enfin, mon ami, il faut absolument que vous alliez voir Mr. Bingley dès qu’il sera notre voisin.

 

 Je ne m’y engage nullement.

 

 Mais pensez un peu à vos enfants, à ce que serait pour l’une d’elles un tel établissement ! Sir William et lady Lucas ont résolu d’y aller uniquement pour cette raison, car vous savez que, d’ordinaire, ils ne font jamais visite aux nouveaux venus. Je vous le répète. Il est indispensable que vous alliez à Netherfield, sans quoi nous ne pourrions y aller nous-mêmes.

 

 Vous avez vraiment trop de scrupules, ma chère. Je suis persuadé que Mr. Bingley serait enchanté de vous voir, et je pourrais vous confier quelques lignes pour l’assurer de mon chaleureux consentement à son mariage avec celle de mes filles qu’il voudra bien choisir. Je crois, toutefois, que je mettrai un mot en faveur de ma petite Lizzy.

 

 Quelle idée ! Lizzy n’a rien de plus que les autres ; elle est beaucoup moins jolie que Jane et n’a pas la vivacité de Lydia.

 

 Certes, elles n’ont pas grand’chose pour les recommander les unes ni les autres, elles sont sottes et ignorantes comme toutes les jeunes filles. Lizzy, pourtant, a un peu plus d’esprit que ses sœurs.

 

 Oh ! Mr. Bennet, parler ainsi de ses propres filles !… Mais vous prenez toujours plaisir à me vexer ; vous n’avez aucune pitié pour mes pauvres nerfs !

 

 Vous vous trompez, ma chère ! J’ai pour vos nerfs le plus grand respect. Ce sont de vieux amis : voilà plus de vingt ans que je vous entends parler d’eux avec considération.

 

 Ah ! vous ne vous rendez pas compte de ce que je souffre !

 

 J’espère, cependant, que vous prendrez le dessus et que vous vivrez assez longtemps pour voir de nombreux jeunes gens pourvus de quatre mille livres de rente venir s’installer dans le voisinage.

 

 ...

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